L'abbaye d'Hambye un joyau normand

Publié le par Annpôl Kassis

Le retable de l’abbaye d’Hambye à la Grace Cathedral de San Francisco (États-Unis).

Parmi les œuvres d’art conservées dans la Grace Cathedral de San Francisco figure un retable gothique flamand provenant de l’abbaye d’Hambye.

Ce retable a été réalisé dans les Flandres méridionales (Bruxelles où Anvers), grande région productrice aux XVe et XVIe siècles de retables en bois sculpté, dont environ 350 subsistent encore aujourd’hui. Les Etats-Unis, par le biais d’achats de collectionneurs et de donations aux musées, en possèdent cinq dont celui de San Francisco et celui de la Walters Art Gallery de Baltimore, qui provient de la collégiale de Blainville-sur-Crevon, près de Rouen.

Le retable de la Grace Cathedral, exécuté au tout début du XVIe siècle, comporte trois panneaux (triptyque) : au centre la Crucifixion, à gauche le Couronnement d’épines, à droite le baiser de Judas et l’Arrestation de Jésus. Toutefois l’encadrement (la “ caisse ”) et son décor d’architecture gothique sont une reconstitution moderne et le retable devait comporter initialement deux autres scènes (perdues). Il était donc à l’origine composé – selon le schéma habituel - de trois panneaux d’égale dimension : au centre la Crucifixion, à gauche les scènes superposées de l’Arrestation et du Couronnement d’épines, à droite deux épisodes postérieurs à la Crucifixion.

Comment l’abbaye d’Hambye en a-t-elle fait l’acquisition ?

Les seigneurs d’Hambye, au début du XVIe siècle, sont les Estouteville, puissante et riche famille de Haute-Normandie. Le jeune Louis d’Estouteville, âgé de vingt ans, devient en 1504 abbé d’Hambye, grâce à la protection familiale et contre l’avis des moines. Pour s’attacher la communauté monastique, et comme sa famille entretient des liens étroits avec les Flandres, il offre alors ce beau retable qui est placé dans l’église abbatiale.

Lors de la Révolution française, en 1794, ce qui reste du mobilier de l’abbaye est vendu aux enchères et un cultivateur d’Hambye, nommé Levillain, achète « l’autel de l’abbaye avec sa contretable » ainsi qu’une « armoire à trois volets servant à renfermer les papiers du chartrier avec le Christ ». Le retable flamand pourrait être cette contretable, placée sur l’autel ou peut-être, puisqu’il n’en subsiste que trois panneaux, l’armoire à trois volets dont l’un est décoré d’une Crucifixion.

En 1890 un collectionneur français, M. de la Fressange, l’achète au petit-fils de Levillain, puis le vend au musée du Louvre. Le conservateur du musée, Molinié, le revend au marchand d’art parisien Raoul Heilbronner. Le retable passe ensuite à son gendre, le marchand Maurice Stora. Ce dernier le cède en 1931 à Mrs William H. Crocker de San Francisco qui en fait don à la Grace Cathedral.

La chapelle latérale de la Grace Cathedral, où est conservé le retable d’Hambye, a été édifiée sur le modèle de la Sainte Chapelle de Paris. Une réplique de la Porte du Paradis de Ghiberti (Baptistère de Florence) donne accès à la cathédrale qui abrite, outre le retable d’Hambye, un Christ catalan en bois du début du XIVe siècle, un bas relief de Mino da Giovanni de Fiesole (Vierge à l’Enfant) du XVe siècle et une tapisserie des Flandres (la Résurrection) du milieu du XVIe siècle, pièces exceptionnelles qui lui viennent des donations de ses riches paroissiens.

texte de Bernard Beck

Le retable; l'Abbaye et ses environs
Le retable; l'Abbaye et ses environs
Le retable; l'Abbaye et ses environs

Le retable; l'Abbaye et ses environs

Publié dans spectacles vus

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